Plusieurs facteurs différents exercent une influence sur le pH d’un substrat de culture. Deux de ces facteurs ont été abordés dans des articles antérieurs : l’alcalinité de l’eau d’irrigation ainsi que la quantité et la forme de calcaire que contient le substrat de culture. Le présent article porte sur le troisième principal facteur : l’azote.

Dans les engrais standards utilisés en pépinière, l’azote est fourni sous la forme d’ammonium (NH4+), de nitrate (NO3-) ou d’urée. Chacune de ces trois sources d’azote, lorsqu’elle est absorbée par les racines des plantes, provoque différentes réactions chimiques ayant différents effets sur le pH du substrat de culture.

analyse (en Anglais) type des éléments composant un engrais
Voici une analyse (en Anglais) type des éléments composant un engrais. Vous remarquerez que l’azote total, l’azote ammoniacal et l’azote nitrique figurent sur les trois premières lignes. Source: Premier Tech

 

Azote ammoniacal (ammonium)

L’azote ammoniacal (NH4+) absorbé par la plante est converti en ammoniac (NH3) par les racines. Ce processus résulte de la libération par les racines de la plante de cations H+ chargés positivement. Ensuite, les cations Hréagissent avec le substrat de culture et réduisent le pH de ce dernier. Plus l’engrais est concentré en azote ammoniacal, plus l’engrais réduira le pH du substrat de culture.

Un processus appelé nitrification peut aussi assurer un apport en azote ammoniacal à la plante. Dans ce processus, des microorganismes présents dans le substrat de culture dégradent l’azote ammoniacal, libérant ainsi des cations H+ et réduisant le pH du substrat de culture. Ce processus est le plus efficace lorsque la température du substrat de culture est supérieure à 10 °C (50 °F) et les microorganismes sont très actifs.

Étant donné que la nitrification requiert de la chaleur afin que les microorganismes puissent activement dégrader l’azote ammoniacal, elle n'est généralement pas recommandée comme principale source d’azote pendant les mois frais de l’hiver. Il faut aussi noter que les plantes cultivées à des concentrations élevées d’azote ammoniacal, surtout dans un substrat de culture froid, peuvent montrer des signes de toxicité en ammonium et de chlorose ainsi que des taches nécrotiques sur le feuillage plus vieux.

toxicité en ammonium
Le chrysanthème de gauche montre des symptômes de toxicité en ammonium, tandis que celui de droite est en santé. Vous remarquerez la chlorose et les petites taches brunes près du bord des feuilles. Source: Premier Tech 

 

Azote sous forme nitrate

L’azote sous forme nitrate fonctionne différemment. Il provoque la libération d’anions OH- ou HCO3- chargés négativement lorsqu’il est absorbé par les racines de la plante. Ces anions chargés négativement sont des bases et, lorsqu’ils réagissent avec le substrat de culture, ils provoquent une élévation du pH du substrat de culture. Si l’engrais utilisé renferme une concentration élevée de nitrates, il aura alors un effet plus marqué sur l’élévation du pH du substrat de culture.

Urée

L’azote uréique ((NH2)2CO), la troisième source d’azote, est souvent dégradé par les microorganismes dans le substrat de culture pour former de l’ammonium (NH4+) et du dioxyde de carbone (CO2-). Comme mentionné ci-dessus, lorsque les racines d’une plante absorbent de l’azote ammoniacal, elles libèrent des cations H+ dans le substrat de culture, réduisant ainsi le pH de ce dernier. Cependant, il existe des preuves solides démontrant que les racines de la plante absorbent une certaine quantité d’urée – une substance dépourvue de charge électrique. Par conséquent, l’urée est considérée comme neutre et n’a donc aucun impact sur le pH du substrat de culture.

Souvent, les plantes ne peuvent absorber l’azote que s’il est présent sous la forme d’ammonium ou de nitrate. L’azote dans les engrais organiques doit donc être dégradé en l’une ou l’autre de ces formes par les microorganismes dans le substrat de culture avant de pouvoir être absorbé par les racines de la plante.

Par conséquent, l’effet des engrais organiques sur le pH du substrat de culture dépendra de la façon dont la matière organique contenue dans l’engrais est dégradée. Cependant, la plupart des engrais organiques se dégradent en la forme ammoniacale de l’azote et réduisent donc le pH du substrat de culture.

Autre que la nitrification, l’impact de la forme d’azote sur le pH du substrat de culture ne se manifeste que lorsque la plante absorbe l’azote. Si la plante est très petite ou n’est pas en croissance active, elle absorbe peu d’engrais et l’ajout d’engrais n’aura donc aucun effet sur le pH du substrat.

Comprendre l’effet de la forme d’azote sur le pH du substrat de culture représente un outil de plus dans l’arsenal de l’horticulteur qui cherche à optimiser la disponibilité des nutriments. Cette compréhension, combinée à la connaissance de l’alcalinité de l’eau d’irrigation, permet à l’horticulteur de choisir un engrais dont la formulation assurera une croissance optimale des plantes.

En règle générale, il est possible de contrôler le pH du substrat de culture en choisissant la forme d’azote pourvu que l’alcalinité de l’eau d’irrigation ne dépasse pas 235 ppm CaCO3. Une fois que l’alcalinité dépasse 235 ppm CaCO3, l’acidité requise pour maintenir un pH souhaitable dans le substrat de culture ne peut plus être maintenue par l’engrais seul et il est alors recommandé de procéder à une injection d’acide. 

Pour maintenir un pH optimal et maximiser la disponibilité des nutriments dans le substrat de culture, les horticulteurs devraient mesurer le pH du substrat de leurs différentes cultures à intervalles réguliers. C’est en surveillant le pH d’un substrat de culture qu’il sera possible de rectifier les applications d’engrais avant que des problèmes de nutriments ne viennent nuire à la croissance des plantes.