Fertilisation idéale pour les légumes et les fines herbes en serre
En termes de fertilisation, les légumes et les fines herbes ont des besoins semblables aux plantes ornementales au début de leur cycle de production. Toutefois, lors du passage de la croissance végétative à la production de fleurs et de fruits, les besoins nutritifs des plantes changent pour chaque culture. Ci-dessous, vous trouverez les principaux éléments à considérer en ce qui a trait aux programmes de fertilisation reconnus dans l’industrie.
L'influence du substrat
Le substrat est un paramètre qu'il faut considérer dans le cadre d'un programme de fertilisation. Les substrats inertes, comme la perlite et la laine de roche, n'ont qu'une faible ou même aucune capacité d'échange cationique (CEC). Par conséquent, les éléments nutritifs fournis ne proviennent que de la solution de substrat. D'un autre côté, les ingrédients de substrats organiques, comme la tourbe, ont une CEC = 200 meq/100 g, ce qui signifie qu'ils retiendront certains cations (NH4, Ca, K, Mg et Na) et que ceux-ci seront libérés dans la solution de substrat afin de maintenir l'équilibre avec les anions. La conductivité électrique et le pH sont relativement faciles à modifier dans les substrats inertes puisque leur pouvoir tampon est faible et que ces paramètres peuvent être changés rapidement. À l’inverse, les substrats ayant une CEC significative sont plus stables.
Si l'on utilise du paillis ou de l'écorce comme ingrédient dans un substrat, il faut qu'il/elle soit complètement composté(e) ou il/elle continuera de se composter dans le contenant, subtilisant de l'azote à la culture et créant de la chaleur qui pourrait endommager ou tuer les racines. D'autres problèmes liés au fait d'utiliser du paillis ou de l'écorce partiellement composté(e) incluent la teneur initiale en sels (conductivité électrique), ce qui peut être un problème pour les plantes aux excès de sels.
La qualité de l'eau
Avant d'établir un programme de fertilisation, il est essentiel de savoir ce que contient l'eau d'irrigation. L'eau peut contenir des éléments nutritifs requis par les plantes, comme du Ca ou du Mg, et son alcalinité influence le pH du substrat. Si l'on utilise de l'eau obtenue par osmose inversée, le ou les engrais utilisé(s) ont une plus grande importance; il est recommandé d'utiliser un engrais neutre pour minimiser la fluctuation du pH.
La fertilisation des semis
De l'ensemencement jusqu’à la première semaine après la germination, les semis n'ont besoin d'aucun engrais puisque les cotylédons, lesquels sont préformés à l'intérieur des graines, ont tous les éléments nutritifs initiaux nécessaires à la croissance du semis. Une semaine après la germination, les semis ont besoin d'une petite quantité d’éléments nutritifs, principalement N, P et K (de ¼ à ½ fois la quantité requise lors de la croissance active et de la phase de production de fleurs/fruits). Rappelez-vous que les semis et les plantes ne croîtront pas mieux ou plus rapidement si des taux d'engrais plus élevés que recommandé sont appliqués.
En fait, une surfertilisation peut avoir un impact négatif sur la croissance (plantes plus végétatives ou déformées) et peut entraîner une réduction de la production de fruits, plus de problèmes d'insectes et l'accumulation de sels, lesquels peuvent brûler les racines et tuer les semis. Les jeunes semis sont particulièrement sensibles aux taux élevés d'engrais/sels dans le substrat. Donc, la conductivité électrique devrait se situer en-dessous de 1,5 dS/m (mmhos/cm) en utilisant la méthode 2:1 (2 volumes d’eau : 1 volume de terreau). Un substrat conçu pour la germination des semences, comme le PRO-MIX® FPX, contient un engrais de démarrage qui répond aux besoins nutritifs initiaux des semis jusqu'à la formation des premières vraies feuilles.
Concevoir un programme de fertilisation
Normalement, les serriculteurs préparent leur propre solution nutritive de A à Z. Les éléments nutritifs sont typiquement séparés en trois réservoirs de solutions de base :
- Réservoir A: calcium, azote et fer
- Réservoir B: potassium, phosphore, soufre, magnésium et micronutriments
- Réservoir C: acide
Il est important de ne pas mélanger le calcium et le phosphore, le calcium et le soufre, ou le fer et le phosphore puisque cela pourrait former des précipités. Il est primordial d'utiliser des ingrédients solubles dans l'eau puisqu'ils seront injectés dans le système d'irrigation. La solubilité d'un engrais est influencée par la température (plus soluble lorsque la température de l'eau est élevée); la quantité d'engrais qui peut être dissoute dans chaque litre d'eau varie selon le type d'engrais. Les engrais sont injectés dans le système d'irrigation à un ratio typique de 1:100. Cela signifie que chaque litre de solution de base sera mélangé à 100 litres d'eau.
Aucun engrais ou solution nutritive n’est parfait pour toutes les plantes. Tel que décrit plus haut, un engrais doit correspondre au besoin de l’espèce de plante, du stade de développement de la plante, de la période de l'année, et des conditions environnementales. Par exemple, les légumes à feuilles et les fines herbes requièrent presque la même quantité d'azote (N), de potassium (K) et de calcium (Ca), tandis que les plantes à fruits, telles que les tomates, requièrent 1,5 fois plus de potassium que d'azote et de calcium lors de la production de fruits. Les taux d'application pour les engrais pour tomates commencent avec 50 ppm N, puis augmentent à 100 ppm N après la transplantation, 150 ppm N à partir de la première grappe, et finalement, 200 ppm après la cinquième grappe.
Programme de fertilisation : les éléments à considérer
Les plantes légumières qui produisent des fruits utilisent 50 % de l'azote pour les feuilles, et 50 % pour les fruits. D'un autre côté, les légumes à feuilles et les fines herbes utilisent 100 % de l'azote pour les feuilles; cela explique pourquoi ils ont besoin de presque la même quantité d'azote que de potassium et de calcium. La saveur des légumes et des fines herbes peut être améliorée en stressant ces plantes par une application excessive d'engrais. Toutefois, ce stress réduit le poids des fruits et la taille des cultures à feuilles.
Le calcium est un élément immobile dans la plante; une carence en calcium peut être observée même si la bonne quantité de calcium est ajoutée à la solution nutritive de base. L'absorption de calcium dépend beaucoup de la transpiration de la plante. Si l'absorption de calcium est faible en raison d'une transpiration lente lors de conditions nuageuses et froides ou encore lors de conditions chaudes et sèches, la plante ne peut obtenir d'eau. Cela provoque une carence en calcium qui peut entraîner une pourriture apicale chez les tomates, les poivrons, les courges, etc.
Pendant l'hiver, les légumes et les fines herbes requièrent moins d'eau que pendant l'été en raison d'un taux de transpiration plus faible. Toutefois, les taux d'application des éléments nutritifs demeurent les mêmes pendant toute l'année puisque les besoins ne changent que très peu, que ce soit l'été ou l'hiver. Cela s'explique surtout parce que les serres font en sorte que les producteurs dépendent moins de l'environnement extérieur (température, lumière, longueur des jours, précipitations, etc.). Elles offrent un environnement de croissance optimal pendant toute l'année. Puisque les plantes utilisent moins d'eau l'hiver et que les besoins nutritionnels ne changent pas vraiment, elles sont fertilisées à des taux légèrement supérieurs que pendant l'été afin qu'elles ne manquent pas d’éléments nutritifs entre les arrosages.
Typiquement, les niveaux d'engrais sont mesurés par la conductivité électrique (dS/m). Par exemple, la conductivité électrique de l'engrais fourni aux tomates au plus fort de la période de récolte au printemps est de 2,5 dS/m (avec une fraction lixiviée recommandée de 10-30 % par arrosage). Il est également recommandé que le lixiviat ait une conductivité électrique de 1 unité supérieure à la conductivité électrique de la solution d'engrais. Il est préférable de tester la conductivité électrique et le pH de la solution fertilisante et de la solution qui s’écoule par les trous de drainage tous les jours, et de faire les ajustements requis. De plus, ces tests permettent de vérifier le bon fonctionnement des injecteurs et la concentration réelle en nutriments.
Enfin, il est recommandé d'envoyer des échantillons de tissu végétal au laboratoire toutes les deux semaines, et d'apporter des correctifs au programme de fertilisation, si nécessaire. Ne changez pas la teneur en éléments nutritifs trop drastiquement. Il est préférable de procéder graduellement. Les plantes devraient répondre à ces changements à l'intérieur d'une période de deux semaines. Envoyez d'autres échantillons au laboratoire pour voir si les correctifs ont fonctionné ou si d'autres ajustements s'imposent.